Introduction des cours Dossiers documentaires Bibliographies
1304, 19 mars. Acte de l'administration royale (Toulouse)
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Dossier 38
  1. Caractères externes

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Essai

Le format de l'acte est réduit (16 x 9 cm). De la mise en page et de l'écriture se dégage une impression de clarté et de sobriété : mots soigneusement tracés, résistance à la tentation de la cursivité, discrétion et pertinence des systèmes d'abréviation et de ponctuation, volonté délibérée d'écrire les chiffres en toutes lettres (seul le quantième est en chiffres romains), pour éviter toute falsification. Mais, à y regarder de plus près, transparaît aussi le soin apporté à la mise par écrit : une justification globalement harmonieuse, la multiplicité des petites capitales initiales à redoublement, la variété des signes abréviatifs, la grâce des jambages finaux plongeants y concourent également. Une parcelle de la majesté royale y transparaît, comme d'ailleurs dans l'emploi du “ nous ” par l'officier royal. La langue pourtant ne cède rien de sa précision, voire de sa technicité. Le formulaire évite toute fioriture : notification et corroboration à part, elles-mêmes fort dépouillées, le regeste français est quasiment aussi long que le texte.

Il ressort en fin de compte de l'examen de ce modeste parchemin une impression d'autant plus nette de maîtrise rédactionnelle (contrastant avec la légère erreur faite dans les calculs !) que le type et le montage documentaires sont plus complexes que dans le tout-venant des mandats de paiement et des quittances que nous a légués l'administration financière royale.

Le document n'a pas de dispositif à proprement parler : il ne transmet pas d'ordre, ni n'exprime de volonté. Le trésorier constate, sous son sceau, et sa parole suffit sans qu'il soit besoin d'obligation expresse : l'engagement est implicite. L'acte vaut essentiellement attestation, certificat. Mais, ce faisant, il répond à une double finalité, successivement évoquée : d'abord, la finalité de la quittance, attestant un paiement fait, mais ici inversée puisque c'est l'agent du paiement qui parle, et non le récipiendaire (sans doute celui-ci a-t-il parallèlement délivré une quittance au trésorier) ; d'autre part, la finalité de l'engagement à payer une somme, symétrique du mandat de paiement, puisque c'est ici le comptable et non l'ordonnateur qui parle.

Ce n'est pas par maladresse, mais plutôt par économie que le formulaire est aussi elliptique. Car l'acte qui nous est parvenu s'insère dans un ensemble documentaire beaucoup plus vaste, auquel il fait partiellement allusion : comptes du capitaine de Gascogne, qui donne le détail des sommes dues ; “ lettres ” du même (à n'en pas douter le mandat de paiement originel, portant sur l'ensemble de la somme). Ces dernières ont été remises au trésorier à sa demande (penes nos retinuimus) : elles se voient ainsi “ désamorcées ” par un stratagème archivistique (le créancier ne pourra en exciper pour tenter d'obtenir un paiement intégral maintenant qu'il a été en partie payé), car on ne peut y inscrire la mention du premier paiement (addition que l'on pourrait contester comme frauduleuse), ni les détruire (le trésorier en aura besoin comme pièce justificative). Le présent acte va donc les remplacer chez le créancier, qui devra présenter son nouveau titre pour encaisser la seconde moitié de la somme due, avant ici encore de le rendre, accompagné d'une autre quittance.

On notera, chose courante, qu'aucun terme n'est donné à la fin du remboursement : les caisses royales peinent à solder les comptes de la guerre déjà passée, à charge pour le créancier de se présenter et représenter. Toutefois, comme il y a toutes les chances que le document nous soit parvenu par le biais des archives de la Chambre des comptes et non des archives privées de Guilhem de Pezens, on peut être quasi certain que le remboursement a été intégral.