Introduction des cours Dossiers documentaires Bibliographies
1265, septembre. Acte sous sceau seigneurial (Bourgogne)
Notice   •   Fac-similé interactif   •   Texte et traduction•  Commentaire diplomatique
Dossier 94
  1. Commentaire diplomatique

Essai

Établi au nom du seigneur et validé de son sceau, par un rédacteur parfaitement transparent (un chapelain, un écrivain public, un clerc du comte de Champagne ?), l’acte est rapide, peu soucieux de décorum (les lignes n’ont pas été préparées), insensible à la présence de corrections (un mot ajouté à la relecture car manifestement omis, fié, l. 5 ; une répétition non relevée, mes mes, l. 7). L’écriture, presque hâtive mais non cursive, est comme toujours en français avare d’abréviations. Le discours est structuré, les périodes assez longues, encore que la dernière clause (que nous ne sommes pas certains de bien comprendre) ait manifestement l’apparence d’un ajout après les clauses plus générales de garantie et d’obligation (à moins qu’elle ne figure logiquement à cette place pour envisager les temps, non de la passation de l’acte, mais des héritiers).

Si le discours peut sembler difficile à pénétrer, c’est moins la faute du rédacteur et des protagonistes que de la distance qui nous sépare de la transaction et de ses ressorts juridiques et sociaux, clairs pour eux, maîtrisés et fonctionnels dans leur formulation : les titres, la qualification des biens concernés (les possessions de Jean à Gémeaux sont soit des fiefs tenus de lui, soit des demeneures, « domaines » qu’il exploite en faire-valoir direct ou qu’il fait exploiter à cens ou à ferme), la qualification des droits et devoirs féodaux sont précisément évalués et cités.

La complexité des liens, voulue par la procédure de « reprise en fief » d’un alleu, accrue dans cette zone de confins de principautés par un échafaudage de ligesses relatives, n’est pas obstacle mais au contraire outil de la construction de rapports sociaux efficaces au sein d’un consortium fluide de puissants, toujours soumis à renégociation, association souple aux multiples paramètres, tendue vers l’échange de services et (de façon beaucoup moins explicite) vers le partage des gains. L’instrument diplomatique mis à son service est sans fioriture ni rhétorique, efficace et presque passe-partout.