Un premier aspect de l'acte est lié à la pratique de la rente, versement annuel, fixe et perpétuel, d'une somme en numéraire ou en espèces. Il s'agit ici d'une rente en numéraire, assignée sur les revenus d'un péage, dont le détenteur consent ainsi de perdre une partie de ses revenus, soit parce que lui-même ou un prédécesseur a jadis reçu un versement d'argent, soit, et plus vraisemblablement dans le cas présent, parce qu'il en fait un don, un cadeau, au bénéficiaire, dont il s'attire les grâces ou qu'il rétribue par ce moyen (quand l'échange est coulé dans le moule de la féodalité, on parle de « fief-rente »). Mais, comme bien souvent, le bénéficiaire de la rente ne peut toujours se faire payer régulièrement ; on apure ici six années de retard (« arrérages »).
Le second aspect du document est lié à la situation particulière du Gévaudan. Depuis un accord de février 1307, le pays était tenu en « pariage » par l'évêque de Mende et le roi de France. Les droits du roi étaient exercés par un bailli, relevant de la sénéchaussée de Nîmes-Beaucaire. L'organe judiciaire le plus élevé, instance où les deux co-seigneurs intervenaient à parité, était dit « cour commune du Gévaudan » ; elle avait à sa tête un bailli (distinct du bailli royal, en résidence à Marvejols, et du bailli épiscopal, installé à Mende). C'est cette instance (sans doute à la suite d'une plainte du seigneur bénéficiaire de la rente) qui a ordonné de régler les arrérages.
Jean Saurier, qui gère la caisse du péage, déclare avoir versé 10 livres 10 sous tournois. Or les arrérages des six années non acquittées monteraient à 70 sous [soit 3 livres 10 sous] x 6 = 21 livres, dont la somme versée ne représente que la moitié. Comme on précise bien qu'elle est versée « pro parte regia », la situation particulière du Gévaudan permet de supposer que l'autre co-seigneur, l'évêque de Mende, devait s'acquitter de l'autre moitié de la rente, donc aussi de l'autre moitié des arrérages — ici encore aux soins de Jean Saurier, ou bien d'un autre, on ne sait : le document, adressé à l'administration financière royale, ne s'occupe pas de cet second volet de l'affaire.
Le document appartient au vaste ensemble des pièces justificatives des comptes d'officiers royaux, qui leur permettent de justifier, sous la forme d'actes authentiques (actes notariés ou d'officialité, lettres de bailliage ou de prévôté, actes sous sceau personnel…), les moindres lignes de leurs comptes. Au chapitre des dépenses, ces pièces justificatives sont essentiellement le mandat, qui ordonne une dépense, et la quittance, qui en constate le règlement — le destinataire en étant toujours le comptable qui les produit à l'appui de ses comptes. Leur explosion se situe précisément à l'époque du document, avec la mise en place de procédures comptables renouvelées et centralisées à la chambre des comptes de Paris.
On peut supposer que le présent document entre dans cette catégorie, même s'il constitue une forme un peu particulière de quittance, dont la version de base eût été une quittance du seigneur, payé de ses arrérages, au comptable. Mais cette forme s'explique bien si l'on considère que trois personnages et non deux sont en cause : le bénéficiaire de la rente ; le gestionnaire du péage ; et le trésorier de la sénéchaussée, au compte de qui (seul vérifié par la chambre des comptes) le compte particulier du péage est sans doute intégré, et qui accueille la reconnaissance dans ses « bureaux » de NÎmes (in domo thesaurarie). Une pièce justificative au nom du comptable n'aurait pas eu de valeur. Il était donc logique, faute d'une quittance au nom du bénéficiaire de la rente, qu'elle fût passée au nom de celui qui tenait, concrètement, le péage. Le terme technique de « défalquer » exprime clairement que l'opération comptable est perçue comme un débit pour le trésorier, et comme un crédit pour le péager.
On peut donc proposer le regeste suivant :
Un premier aspect de l'acte est lié à la pratique de la rente, versement annuel, fixe et perpétuel, d'une somme en numéraire ou en espèces. Il s'agit ici d'une rente en numéraire, assignée sur les revenus d'un péage, dont le détenteur consent ainsi de perdre une partie de ses revenus, soit parce que lui-même ou un prédécesseur a jadis reçu un versement d'argent, soit, et plus vraisemblablement dans le cas présent, parce qu'il en fait un don, un cadeau, au bénéficiaire, dont il s'attire les grâces ou qu'il rétribue par ce moyen (quand l'échange est coulé dans le moule de la féodalité, on parle de « fief-rente »). Mais, comme bien souvent, le bénéficiaire de la rente ne peut toujours se faire payer régulièrement ; on apure ici six années de retard (« arrérages »).
Le second aspect du document est lié à la situation particulière du Gévaudan. Depuis un accord de février 1307, le pays était tenu en « pariage » par l'évêque de Mende et le roi de France. Les droits du roi étaient exercés par un bailli, relevant de la sénéchaussée de Nîmes-Beaucaire. L'organe judiciaire le plus élevé, instance où les deux co-seigneurs intervenaient à parité, était dit « cour commune du Gévaudan » ; elle avait à sa tête un bailli (distinct du bailli royal, en résidence à Marvejols, et du bailli épiscopal, installé à Mende). C'est cette instance (sans doute à la suite d'une plainte du seigneur bénéficiaire de la rente) qui a ordonné de régler les arrérages.
Jean Saurier, qui gère la caisse du péage, déclare avoir versé 10 livres 10 sous tournois. Or les arrérages des six années non acquittées monteraient à 70 sous [soit 3 livres 10 sous] x 6 = 21 livres, dont la somme versée ne représente que la moitié. Comme on précise bien qu'elle est versée « pro parte regia », la situation particulière du Gévaudan permet de supposer que l'autre co-seigneur, l'évêque de Mende, devait s'acquitter de l'autre moitié de la rente, donc aussi de l'autre moitié des arrérages — ici encore aux soins de Jean Saurier, ou bien d'un autre, on ne sait : le document, adressé à l'administration financière royale, ne s'occupe pas de cet second volet de l'affaire.
Le document appartient au vaste ensemble des pièces justificatives des comptes d'officiers royaux, qui leur permettent de justifier, sous la forme d'actes authentiques (actes notariés ou d'officialité, lettres de bailliage ou de prévôté, actes sous sceau personnel…), les moindres lignes de leurs comptes. Au chapitre des dépenses, ces pièces justificatives sont essentiellement le mandat, qui ordonne une dépense, et la quittance, qui en constate le règlement — le destinataire en étant toujours le comptable qui les produit à l'appui de ses comptes. Leur explosion se situe précisément à l'époque du document, avec la mise en place de procédures comptables renouvelées et centralisées à la chambre des comptes de Paris.
On peut supposer que le présent document entre dans cette catégorie, même s'il constitue une forme un peu particulière de quittance, dont la version de base eût été une quittance du seigneur, payé de ses arrérages, au comptable. Mais cette forme s'explique bien si l'on considère que trois personnages et non deux sont en cause : le bénéficiaire de la rente ; le gestionnaire du péage ; et le trésorier de la sénéchaussée, au compte de qui (seul vérifié par la chambre des comptes) le compte particulier du péage est sans doute intégré, et qui accueille la reconnaissance dans ses « bureaux » de NÎmes (in domo thesaurarie). Une pièce justificative au nom du comptable n'aurait pas eu de valeur. Il était donc logique, faute d'une quittance au nom du bénéficiaire de la rente, qu'elle fût passée au nom de celui qui tenait, concrètement, le péage. Le terme technique de « défalquer » exprime clairement que l'opération comptable est perçue comme un débit pour le trésorier, et comme un crédit pour le péager.
On peut donc proposer le regeste suivant :
Jean Saurier de Marvejols reconnaît que le trésorier royal de la sénéchaussée de Beaucaire et Nîmes, Guirard Peyre, a défalqué de ce qu'il doit lui reverser de la recette du péage de Larcis, la somme de 10 £ 10 s. t., que Jean a remise, pour le compte du roi, sur ordre du juge et du lieutenant du bailli de la cour commune de Gévaudan, à Bernard, seigneur de Bénévent, au titre des arrérages d'une rente de 70 s. assise sur le péage et qui n'avait pas été acquittée depuis six ans. — Acte passé devant le notaire royal Paul André.