Les protagonistes ont fait appel à un prêtre lettré, un type de figure très fréquent, avec de simples diacres, parmi les rédacteurs d’actes privés du sud-ouest de la France jusqu’au seuil du XIIIe siècle. On ignore ses fonctions (il n’est pas forcément curé), mais il semble habitué à la production d’actes courants. Il maîtrise un formulaire routinier et efficace. Ce formulaire est largement dégagé des scories linguistiques des siècles passés, où se lisait plus immédiatement le vigoureux aller-retour entre latin et vernaculaire. Il tire fondamentalement sa force du stéréotype, adapté vaille que vaille à l’intensification des transactions. Il permet de faire du neuf sous couleur de l’ancien.
Car si une approche purement formelle reconnaît ici un produit dérivé, mais très direct, des actes du haut Moyen Âge, eux-mêmes tirés de l’Antiquité, le fond a évolué : la carta donationis sert ici à formuler un accensement désormais perpétuel, assorti d’un droit d’entrée élevé ; les usages anthroponymiques et chronologiques sont modernes ; le système de localisation des biens cherche à mieux coller aux circonscriptions contemporaines, sans encore se soucier de microtoponymes.
La formulation même du « discours » diplomatique renforce le sentiment : le contraste est net entre la rigide charpente du formulaire (fondée sur un séculaire Donatores sumus vobis…) et la possibilité d’ajouter une clause complémentaire après la date. Or cette addition (Et dedit Petrus…) introduit une discordance, car elle est très significativement rédigée de façon objective par le prêtre (le eis y correspond au nos du début de l’acte), qui a effectivement repris la parole au moment de clore l’acte (date, souscriptions). Le vernis antique de l’acte subjectif, qui faisait dialoguer les parties, commence à craquer, et le notaire (comme l’autorité notificatrice et scellante au nord) à émettre le discours.
Mi-rustiques et mi-savants, mi-traditionnels et mi-novateurs, ces petits actes demeurent au plus près de la vie économique et sociale de tous les jours, qu’ils confortent d’un fin réseau d’écrits entre simples particuliers, promis à des destructions massives. Celui-ci, conservé dans le fonds de la Procuration royale de Majorque, a dû apparemment son salut au passage des vignes, à une date inconnue, dans le domaine comtal de Roussillon.
Les protagonistes ont fait appel à un prêtre lettré, un type de figure très fréquent, avec de simples diacres, parmi les rédacteurs d’actes privés du sud-ouest de la France jusqu’au seuil du XIIIe siècle. On ignore ses fonctions (il n’est pas forcément curé), mais il semble habitué à la production d’actes courants. Il maîtrise un formulaire routinier et efficace. Ce formulaire est largement dégagé des scories linguistiques des siècles passés, où se lisait plus immédiatement le vigoureux aller-retour entre latin et vernaculaire. Il tire fondamentalement sa force du stéréotype, adapté vaille que vaille à l’intensification des transactions. Il permet de faire du neuf sous couleur de l’ancien.
Car si une approche purement formelle reconnaît ici un produit dérivé, mais très direct, des actes du haut Moyen Âge, eux-mêmes tirés de l’Antiquité, le fond a évolué : la carta donationis sert ici à formuler un accensement désormais perpétuel, assorti d’un droit d’entrée élevé ; les usages anthroponymiques et chronologiques sont modernes ; le système de localisation des biens cherche à mieux coller aux circonscriptions contemporaines, sans encore se soucier de microtoponymes.
La formulation même du « discours » diplomatique renforce le sentiment : le contraste est net entre la rigide charpente du formulaire (fondée sur un séculaire Donatores sumus vobis…) et la possibilité d’ajouter une clause complémentaire après la date. Or cette addition (Et dedit Petrus…) introduit une discordance, car elle est très significativement rédigée de façon objective par le prêtre (le eis y correspond au nos du début de l’acte), qui a effectivement repris la parole au moment de clore l’acte (date, souscriptions). Le vernis antique de l’acte subjectif, qui faisait dialoguer les parties, commence à craquer, et le notaire (comme l’autorité notificatrice et scellante au nord) à émettre le discours.
Mi-rustiques et mi-savants, mi-traditionnels et mi-novateurs, ces petits actes demeurent au plus près de la vie économique et sociale de tous les jours, qu’ils confortent d’un fin réseau d’écrits entre simples particuliers, promis à des destructions massives. Celui-ci, conservé dans le fonds de la Procuration royale de Majorque, a dû apparemment son salut au passage des vignes, à une date inconnue, dans le domaine comtal de Roussillon.