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1245, 14 janvier. Lettres pontificales sur fil de chanvre
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Dossier 45

Pratiquée par le Saint-Siège depuis la plus haute Antiquité, le genre de la lettre a connu, avec la Réforme grégorienne, une formalisation et une explosion quantitative qui ont suscité la naissance d’un type documentaire original, source d’inspirations multiples pour les autres autorités (évêques, souverains...) de la chrétienté. Ce produit de la chancellerie, qualifié de « lettres apostoliques » au sens technique (il vaut mieux éviter le terme de « bulle », ou trop vague ou très précis), a été le support favori des interventions ponctuelles de la papauté, à côté et très vite en substitution des privilèges, trop lourds. L’allure rédactionnelle, les particularités de la date de temps (le jour et le mois ne sont complétés de l’année de pontificat que sous Clément III et de l’année de l’Incarnation que sous Eugène IV) trouvent leur explication immédiate dans ces origines.

Mais très vite, comme l’on pouvait s’y attendre, ces lettres transmettant des ordres et des conseils, plutôt que des informations, furent tenus par les destinataires pour des titres ou pour des substituts de titres : d’où leur chance de conservation plus forte que pour de simples missives, d’où l’enrichissement de la date de temps, d’où encore et surtout un double processus de fixation de particularités de présentation concourant à l’authentification, et de diversification entre deux rameaux : d’une part des lettres bullées sur lacs de soie (cum serico), à valeur perpétuelle (voir le dossier consacré aux lettres de 1344.) ; d’autre part, des lettres bullées sur fil de chanvre (cum filo canapis : une vulgaire ficelle), notifiant des mesures ou interventions transitoires. Tous les traits graphiques et rédactionnels propres à la seconde catégorie se retrouvent dans le présent document :

Lacs de soie (perpétuelles) Fil de chanvre (transitoires) Pas d’invocation initiale, suscription, adresse, salut (graphié « salt et aplicam ben) Nom du pape grossi, initiale souvent filigranée Seule initiale grossie Initiales secondaires (adresse, Statuentes, Nulli, Si...) systématiquement grossies ? (sauf éventuellement adresse ou début du texte) Ligatures ct/st allongées ? Tilde bouclé Tilde plat Clause prohibitive (« Nulli ergo hominum... » ou « Statuentes ut... ») ? Clause comminatoire (« Si quis... ») ? Pas de corroboration Date de lieu, comput romain des jours, année de pontificat (année de l’Incarnation à partir de 1431), impossibilité de couper entre deux lignes chaque élément de la date Seule validation : bulle de plomb

Le présent exemple montre, avec des milliers d’autres, à quel point la distinction était visible et rigoureuse, mais aussi cohérente. Il a encore l’intérêt de montrer à quel point le fond juridique (la gestion d’une affaire transitoire) et le type diplomatique (le type le plus vulgaire) pouvaient être dissociés du soin apporté à la composition rhétorique, jusque dans la rédaction d’un long préambule, venant renforcer la monition apostolique.